Comment préparer le concours de la magistrature ?



Chers futurs collègues,
C’est un honneur pour moi de prendre la plume aujourd’hui pour répondre à la question suivante : comment préparer le concours de la magistrature ?
Cette question, ainsi posée, admet plusieurs réponses en fonction de la personne interrogée.
L’expérience étant unique, je vous partage la mienne en toute humilité.
C’est Nicolas Boileau qui affirme dans son ouvrage intitulé L'art poétique, I (1674) que :
« Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément ».
C’est ce à quoi votre préparation de la magistrature doit vous conduire.
Aussi, pour reprendre les propos du magistrat Ya Camille lors de la journée portes ouvertes du Centre d’Etudes de Droit au Centre Culturel Comoé : ‘’Lorsque vous étudiez une notion, vous devez être docteur dans celle-ci’’. C’est aussi ce à quoi votre préparation doit tendre.
Ceci dit, retenez que la préparation au concours de la magistrature débute depuis votre première année.
Cette préparation consistera pour vous, à suivre les cours avec intérêt, à être assidus aux travaux dirigés, à fréquenter une bibliothèque et à être engagés dans la vie associative.
A cette préparation préalable s’ajoutera la révision générale des matières prévues pour le concours par la pratique des exercices.
Le concours comporte, sous réserve de changement, cinq (5) matières à l’écrit :
1. Sujet d’Ordre Général ;
2. Droit Civil et Procédure Civile ;
3. Droit Commercial ;
4. Droit Pénal et Procédure pénale ;
5. Droit Administratif ou Droit Constitutionnel.
A l’oral, il y a trois matières à savoir :
1. L’organisation judiciaire ;
2. La procédure civile et la procédure pénale ;
3. Le Grand Oral.
De manière concrète, pour réussir le concours de la magistrature, je vous donne sept (7) conseils pour l’écrit (i) et trois conseils pour l’oral (ii).
(i) Les sept conseils de l’écrit
1er Conseil : Recueillir toutes les lois en fonction des matières ainsi que quelques documents de référence.
Cette étape de la préparation est importante. La connaissance de la législation actualisée est fondamentale quant à la culture juridique exigée. Allez au concours sans savoir par exemple que la Cour d’Assises ou que la Cour Suprême n’existe plus dans l’organisation judiciaire de la Côte d’Ivoire, c’est signer un pacte avec l’échec.
2e Conseil : Rassemblez des anciens sujets de magistrature puis les traiter sans omettre de consulter les corrections fournies par l’Institut National de Formation Judiciaire (INFJ).
On apprend toujours du passé. C’est en ce sens qu’il s’impose au candidat d’avoir une idée des sujets donnés dans les années antérieures. Les corrections de l’INFJ permettent de savoir ce que les correcteurs
attendent des candidats à l’écrit.
3e Conseil : S’attacher les services d’un magistrat ou d’un groupe de préparation.
Qui peut mieux vous parler du concours de la magistrature si ce n’est une personne ou un groupe de personnes ayant déjà traversé le fleuve qui donne accès à la salle de l’école de la magistrature ?
Leurs expériences, non seulement, du concours mais aussi des matières vous permettront de maitriser la
méthodologie propre du concours ainsi que la subtilité attachée à certaines notions en droit.
4e Conseil : Lire les lois les unes après les autres suivant le programme des matières depuis la 1ère année jusqu’à la 5e année.
On écrit que ce qu’on a lu. Il ne suffit pas de lire les ouvrages de doctrine pour penser cerner la ou les notions exigées pour le concours. Il importe d’ajouter à cela, la lecture des codes et lois constituant le
régime juridique de chaque matière au concours.
Retenez toujours que le mérite du succès viendra de vos efforts personnels. Ayez la force d’âme pour poser votre séant et vous mettre résolument, assurément et
assidument à l’étude.
5e Conseil : Traitez au moins un exercice par jour tout en variant dissertation puis cas pratique.
La pratique des exercices affinera votre raisonnement et constituera un avant-gout des épreuves écrites.
C’est le temps multiplié par la concentration qui donne la connaissance. Accordez-vous donc du temps etconcentrez-vous sur les matières constituant les épreuves écrites.
6e Conseil : Confiez le tout à Dieu.
La Parole de Dieu n’enseigne-t-elle pas que le magistrat exerce un pouvoir de Dieu et qu’il a été établi par Lui afin de juger ses semblables ?
Sous ce fondement et si vous êtes croyants, retenez que la préparation de ce concours nécessite l’humilité de confier votre sort à Dieu. Chacun, selon ses croyances, posera les actes nécessaires afin que sa prière soit agréée par Dieu.
Le fait de pouvoir déposer ses dossiers, que ceux-ci soient validés par les organisateurs du concours ainsi que le fait de pouvoircomposer dans l’ensemble des matières, demeurent une faveur divine.
D’où le conseil de confier les différentes étapes de la préparation du concours à celui en qui vous croyez. Dans tous les cas, vous n’avez pas le choix – exercer en tant que
magistrat relève du divin.
7e Conseil : Être très détaché des épreuves.
Le détachement des épreuves est important d’un point de vue psychologique. Il permet de ne pas stresser et d’aborder la préparation avec confiance, sérénité et abnégation.
(ii) Les trois conseils de l’oral
Aussitôt que les épreuves écrites prendront fin, il vous ait vivement recommandé de vous accorder un à deux jours de repos, de pratiquer votre violon d’Ingres. Après cette étape, vous devez entamer la préparation de l’oral. Les conseils suivants sont à suivre.
1er conseil : Procéder à une revue littéraire et au suivi de l’actualité.
Ce conseil consistera pour vous à rassembler l’ensemble des textes sur l’organisation judiciaire ivoirienne ainsi que les codes de procédure civile et pénale sans omettre de vous accorder du temps pour suivre l’actualité ivoirienne, sous régionale et internationale.
2e Conseil : Intégrer un groupe de préparation pour l’oral.
L’oral de la magistrature est très formaliste. Intégrer un groupe s’impose à vous. Ce groupe de préparation peut être le même que celui de l’écrit ou un autre. C’est à vous de choisir.
3e Conseil : S’entraîner aux techniques d’art oratoire.
Ce que l’on attend de vous à l’oral ne se limite pas aux connaissances théoriques mais surtout à votre capacité à rendre oralement ce que vous avez dans le ventre. Ce rendu doit être limpide et clair. Les mots pour exposer doivent arriver aisément.
Le tract est important. Il vient juste annoncer que vous vous apprêtez à franchir une étape importante de votre vie. Il ne sert à rien de trembler devant les membres du jury.
A l’oral, on vient dans un esprit de personne déjà magistrate qui, en toute humilité, s’adresse aux membres du jury.
A la fin de votre exposé, les membres du jury doivent dire ‘’voici l’un des nôtres, il mérite d’être compté parmi nous. Car en effet, il a un savoir, un savoir-faire et un savoir être ’’.
Le silence tue. Eviter de se laisser méduser par une question. A une question posée, le candidat doit y apporter une réponse. S’il ne connait pas la réponse, il doit prendre la parole et répondre d’une certaine manière.
Toutes ces techniques d’art oratoire vous seront apprises dans le groupe de préparation.
Chers futurs collègues,
Aux termes de mon propos, je tiens à rappeler cette maxime latine ‘’Tempus breve est’’ – le temps est court. Je tiens aussi à ajouter cette maxime populaire ‘’Qui veut aller loin ménage sa monture’’. Et terminer en disant ‘’Seul on va plus vite, ensemble, on va plus loin’’.
Laissez-vous guider et conduire par ces conseils quand vous prendrez la décision de préparer le concours de la magistrature.
J’espère qu’au soir des résultats d’admission du concours, l’un d’entre vous qui me lit dira : « ô magister, diem non perdisti ».
Courage et bonne chance !
Par ROMARIC HONSRAN
Auditeur de justice